Depuis
plusieurs semaines, je vois passer des programmations d’Orchestres d’Harmonie
français en uniforme et civils, professionnels et amateurs, et j’avoue, bon
frenchy râleur qui ne changera jamais, que je reste pantois et dubitatif
devant bien devant des choix des directeurs de ces formations. Nous
sommes décidément de grands spécialistes pour nous tirer une balle dans le
pied tout seuls (je laisse le sien aux musiciens italiens de se planter une
canne de direction dans le gros orteil) ou dans une autre veine
cinématographique du « Chef ! Chef ! On a perdu l’estafette ! ». N’en déplaise au Pangloss de la clef de sol et de fa (ut, c’est fini, elles ont
disparu des conservatoires avec la mort du solfège), nous savons pertinemment
que la musique ne se porte pas si bien que cela en notre si brillant pays, Beaucoup
rament à coups de pagaies miniatures pour défendre des sociétés amateurs,
entretenir des formations professionnelles, faire déplacer des spectateurs dans
les salles, sauver les classes déficitaires des conservatoires, tenter de sauver
notre facture instrumentale Made in France qui a les plus grandes difficultés
face aux pays de l’Asie du Sud-Est, vendre des partitions non photocopiées, des
CD non copiés, etc. Je regarde avec
effroi et crainte pour le futur tous les relents nationalistes qui secouent
actuellement notre bonne vieille Europe. L’histoire du XXe siècle a pu nous
avertir des désastres qui attendent l’humanité repliée sur elle-même et accusant
haineusement le voisin. Mais pourquoi les français sont-ils si mauvais pour
défendre la création française ? Dans beaucoup de programmes d’Harmonies
françaises, il n’ y a jamais un compositeur français. De manière étrange, ce phénomène du « trou
noir » a aussi envahi les orchestres symphoniques tricolores qui n’ont
jamais aussi peu proposé des partitions de notre patrimoine musical. Le temps d’un
Michel Plasson à Toulouse ou Jacques Mercier à l’Orchestre d’Ile-de-France est
devenu préhistorique. Que les Harmonies fassent plaisir à leurs musiciens et
aux publics avec les brillantes pièces de l’école belgo-anglo-hollandaise, c’est
flatteur, rondement bien cousu et cela sonne. Mais savent-ils que nous avons
des français qui font aussi bien mais qui n’ont jamais "droit au pupitre" ?
Beaucoup de jeunes musiciens composent ou arrangent en notre pays et ont la
plus grande difficulté à être joué. Il y a toujours cette suspicion chez nous à
regarder de travers le talent, à ne pas faire confiance à nos produits locaux
et nationaux. Je me souviens d’une discussion sur le sujet avec le chef d’orchestre
Alain Pâris. Nous nous amusions à imaginer un contact avec une phalange tricolore
qui devrait engager un certain Alonzo Parigi ou Alan Lutece ! L’orchestre
crierait un "ouf !" de soulagement, un chef italien ou américain, c’est
certainement mieux ! Concernant
le répertoire des Harmonies, un autre sujet m’irrite l’enharmonie au plus point
degré de la dissonance : cette manie des orchestres professionnels en uniforme à donner des transcriptions complètes de Symphonies du
grand répertoire ! A nouveau, sans évoquer le fait de trahir le message du
compositeur en changeant les habits sans son autorisation, il ne doit certainement pas y avoir assez
de répertoire contemporain pour devoir copier les formations avec une section
cordes ! Que des amateurs souhaitent jouer les thèmes ou retrouver les couleurs
d’un "classique" pour symphonique, je peux à la rigueur comprendre mais que les
grands orchestres militaires français qui demeurent le point de mire des tous
les amateurs, admiratifs du grand talent des artistes de ces formations prestigieuses, donnent
ces pâles copies alors que de tant d’œuvres originales pensées initialement
pour Harmonie prennent la poussière sur les étagères, c’est artistiquement
criminel et ne favorise pas des avancées et des progrès par rapport au niveau
et réputation des formations étrangères (Cf. Le disque du mois venu de Belgique). Mais là , nous devons faire face aux
problèmes d’ego et en ce domaine, pour une fois, nous sommes champions du monde ! |