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Fondements d’une Respiration « Inspirée » ! |
Pourquoi un tel titre quelque peu ésotérique ? J’ai mûrement réfléchi et n’ai pas osé celui qui me venait directement à l’esprit à l’écoute d’une affirmation du célèbre trompettiste américain Dizzy Gillepsie. Mardi 11 avril sur France Inter à une heure de grande écoute, l’émission consacrée au trompettiste Ibrahim Maalouf, commençait par une évocation d’une interview de Dizzy Gillepsie. En 1979, Dizzy conseillait aux élèves de la classe de Maurice André du Conservatoire de Paris : « L'essentiel pour un instrument à vent c'est, bien sûr, le souffle. La plupart des professeurs de trompette vous disent de souffler avec le diaphragme. Mais ce n'est pas vrai. En fait, vous soufflez avec le trou du cul… » Fondement d’une pédagogie à creuser ? Dans les conservatoires, je n’ai jamais entendu cette expression. J’avais à l’esprit certains commentaires comme « joue avec tes tripes, avec ton cœur, pousse sur la colonne d’air, respire avec ton ventre, serre les fesses, joue couillu…. » Mais pas comme le préconisait Dizzy. A mon souvenir, aucun de mes anciens professeurs ni collègue enseignant n’a osé ou n’ose en tout cas cette image un peu triviale. Notre anatomie a ceci de particulier que seuls deux muscles sont circulaires, celui du rectum et l’orbiculaire de la bouche. Pour les instrumentistes à vents, serait-ce une piste ? J’ai le souvenir de Dizzy qui a révolutionné le jeu de la trompette et qui avait une façon bien à lui d’emboucher en gonflant exagérément les joues laissant penser que toute sa compression d’air se concentrait dans sa bouche. Eh non, Dizzy nous révélait en 1979 qu’il allait puiser au plus profond de lui sinon son inspiration, son expiration ! Dizzy, s’il recommandait les exercices sur le diaphragme pour la prise d’air, il conseillait de ne pas s’en préoccuper pour la production du son. Pourtant bien des pédagogues instrumentistes à vent ou chanteurs insistent sur le soutien de diaphragme qu’il faut « conceptualiser ». « Pousse sur ton diaphragme… Soutient ton diaphragme… Met de l’air… Pense à ta poussée diaphragmique ou diaphragmatique voire chromatique… ». Depuis les années 1980, la pédagogie instrumentale revisitée fait prendre conscience aux jeunes instrumentistes à vent de la nécessaire visualisation de ce muscle qui rythme notre inspiration instinctive ou volontaire, le diaphragme. Les enseignants expérimentés et documentés insistent sur le fait que ce muscle de forme convexe au repos qui sépare les poumons des viscères n’est contrôlable que pour la prise d’air, en descente. La contraction du diaphragme abaisse son centre phrénique. L’expiration volontaire est réalisée activement par les muscles expirateurs de la sangle abdominale et notamment les muscles transverses. Muscles les plus profonds de la sangle abdominale, les deux transverses sont horizontaux et se rejoignent au niveau de la ligne blanche de l'abdomen (au centre du grand droit). Que vient faire l’anus dans le jeu instrumental ? Intrigué j’essaye de me renseigner. |
Respire ! La respiration totale pour tous Éditeur : Médicis • ISBN : 978-2-85327-367-1 A l’annonce de la sortie du livre, Respire, La respiration totale pour tous par Roger Fiammetti, un ostéopathe belge, j’apprends que nous n’aurions pas un seul diaphragme MAIS QUATRE. Un DVD complémentaire illustre par des images animées en 3D impressionnantes de précisions très utiles pour comprendre. Roger Fiammetti distingue quatre diaphragmes - crânien, - cervical comprenant la langue - thoracique, cloison musculaire séparant l’abdomen de la cage thoracique - pelvien, corbeille musculaire qui relie le sacrum aux os du bassin. Ces quatre diaphragmes travaillent en synergie et stimulent la circulation et les différents centres nerveux. Mais qu’est-ce donc le diaphragme pelvien ? C’est le plancher pelvien, siège du périnée, en fait le fond de l’abdomen. Il est composé de différents muscles et de tissus qui forment une sorte de hamac. Les muscles du périnée obturateur interne, élévateurs, muscles transverses peuvent être contractés et détendus volontairement. Le périnée est traversé par l’anus et par les organes uro-génitaux. L’anus. Nous y voilà. Repensons à Dizzy Gillepsie et à sa puissante image. Plutôt que se focaliser sur ses lèvres ou ses doigtés, Dizzy en jouant ses myriades de notes Be-bop se concentrait sur le contrôle non pas de son anus mais de son périnée, diaphragme pelvien. À l’inspiration forcée, la contraction volontaire du diaphragme thoracique descend son centre phrénique et pousse vers le bas tous les viscères. L’action sur l’ensemble des muscles intercostaux et élévateurs dilatent les côtes. Le volume d’air dans les poumons peut-être maximal si vous relâchez le périnée. Un périnée libre permet un appui facile et profond du diaphragme et "connecte" le haut et le bas du corps. - Dans l’expiration forcée, la contraction de muscles dits « expirateurs » s’ajoute au relâchement des muscles élévateurs. Ainsi une contraction des muscles abdominaux comprime les viscères (« on rentre le ventre ») ce qui refoule le diaphragme vers le haut et accentue la diminution de volume de la cage thoracique et augmente la pression de l’air retenu. Le fait de contracter le périnée tout de suite après l’inspire ou en tout début l’expire fait prendre conscience d’expirer depuis le fond du ventre et non pas depuis le milieu du ventre. Les fessiers au repos, la contraction du périnée engendre la bascule du bassin. Pendant l’expiration, le périnée joue un rôle starter, il amorce la remontée du diaphragme thoracique. Le faisceau inférieur du muscle transverse, celui qui recouvre le grand droit de l'abdomen, est activé en même temps que le périnée. C’est donc cela qu’il fallait entendre quand Dizzy préconisait par une image forte le relâchement à l’inspire et la contraction à l’expire du périnée. En 1865, Alphonse Sax avait-il la même idée quant il publiait son livre « Gymnastique des poumons: La musique instrumentale au point de vue de l'hygiène et la création des orchestres féminins. » Alphonse Sax, facteur d’instrument à vent comme son frère, le célèbre Adolphe, préconisait l’utilisation des cuivres pour les femmes de son époque et avait créé une école de cuivres réservée à la gente féminine. Outre le fait que cette pratique libérait la femme corsetée et souffrant fréquemment de malaises, d’oppression et de syncopes La fanfare féminine d’Alphonse Sax proposait selon lui une thérapie excellente contre l’atrophie des poumons et la tuberculose. Un orchestre expérimental, composé d’une vingtaine de femmes, fut présenté en 1864 lors de l’exposition de l’art industriel à Paris. Au concours orphéonique d’Orbec (Calvados) le 6 août 1865, un quintette féminin, deux cornets, un alto saxomnitonique, un ophicléïde, une basse saxomnitonique remporta deux médailles d’or. Pour Alphonse Sax la pratique d’un instrument à vent était grâce à sa ventilation forcée également une bonne préparation à l’accouchement : « Il faut entretenir la femme dans un état de santé, de force, pour faire des enfants propres à faire des hommes » écrivait-il. Et l’on connait dans ce cas quelle importance réclame l’élasticité du périnée. Dans la pratique et en résumé, le travail du périnée est essentiel pour le bon vieillissement, pour les futures mamans et pour tout le monde. Alors pas de fausse pudeur ! Pour ne pas jouer comme des pieds, pensons à souffler avec notre périnée. |
F.D. |