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Des Nantais dans les Balkans Une première à Guča (Serbie) |
Une fanfare française primée sur les terres lointaines des Balkans Le 9 août dernier « Le Spectre d’Ottokar » fanfare des Balkans, composée de musiciens nantais remporte le Prix du meilleur orchestre au Concours International de Guča (Serbie). Concourant avec les meilleurs orchestres de Serbie, Macédoine, mais aussi du Portugal, Brésil, Italie, Belgique… "Le Spectre d’Ottokar" a été remarqué pour la qualité de son interprétation. Les musiciens Nantais avaient déjà participé l’an dernier à ce concours en se plaçant en deuxième position derrière les champions nationaux de Serbie. Le jury était présidé par Mladen Đorđević, professeur de trompette à Belgrade, le Dr Mirjana Zakić, ethno-musicologue à Belgrade, le Dr Danka Lajić Mihajlović, ethno-musicologue à Belgrade, Vaso Ristov, professeur à la Faculté de musique de Skopje et Daniel Leskovic, conseiller pour la musique instrumentale à l'Institut public des affaires culturelles de la Slovénie à Ljubljana. Palmarès Meilleur Orchestre - Le Spectre D'Ottokar (France) Second orchestre - Go East Orchestra (Brésil) Troisième orchestre - Kadrievi Brothers Orchestra (Belgique) Catégorie meilleur trompettiste Premier prix - Ekrem Mamutović (Serbie) Second prix - Jumbo Agusev (Macédoine) Troisième prix - Seven Masar (Belgique - Macédoine) |
Le festival de Guča Depuis 52 ans, Guča petit village de Serbie accueille chaque année ce rassemblement d’orchestres attirant cette année jusqu’à 800 000 personnes. Un véritable phénomène. Pendant toute la semaine du Festival, parades, concerts et animations de rues et compétitions sur scène devant des milliers de personnes sont retransmises par la chaine nationale de télévision serbe. Guča, devient pendant cette période la capitale mondiale de la trompette. Les deux hôtels de la petite ville ont été pris d'assaut et une majorité des 800 000 visiteurs dorment sous la tente dans une ambiance rappelant celle de Woodstock. Les historiens et les ethnomusicologues se perdent en conjectures sur les origines des fanfares roms. Certains évoquent une possible influence des fanfares militaires ottomanes. L’hypothèse est difficile à vérifier, mais dans toute la Serbie, la trompette est devenue le symbole de la fête. Il n’y a pas de cortège de mariage digne de ce nom sans fanfare tzigane, et les classiques du répertoire sont avant tout des airs pour danser. La trompette reste aussi en Serbie un fort symbole culturel et nationaliste. En 2006, le réalisateur Dusan Milic en a fait un très beau film, Guča, la trompette d'or qui raconte l'affrontement entre un père serbe et le prétendant de sa fille, un Rom. Le pitch : Romeo, un jeune Rom trompettiste, tombe amoureux de Juliana. Cette jeune fille blonde est la fille de Vladisho, le plus célèbre trompettiste de Serbie, qui ne voit pas d'un bon œil les amours de sa progéniture avec un homme de couleur. Surnommé Satchmo en raison de son admiration pour Louis Armstrong, le père se garde bien d'exprimer ses réticences et lance plutôt un défi à Romeo : si ce dernier veut pouvoir approcher Juliana, il devra battre Satchmo au concours de la Trompette d'or à Guča... Marko Markovic, trompettiste virtuose tient le rôle de Romeo. Alors comment des Nantais du Spectre d’Ottokar, trompettes : Micha Passetchnik, Paul Bosseau, Stéphane Scoubart, saxophone alto : Florent Abadie, barytons : Philippe Meslet, Xavier Jamin, Veronica Dubois, Benjamin Lebert, Michel Loirat, hélicon : Hervé Dubois percussions : Alain Durandière et Damien Grimault ont-ils pu conquérir ce titre de meilleure fanfare ? Comment ont-ils franchi depuis 2005 le pas entre l’Ouest de la France et la péninsule des Balkans caractérisée par ses musiques traditionnelles de Serbie, Macédoine, Bulgarie et Roumanie, imprégnées de culture tsigane aux accents tantôt joyeux tantôt mélancoliques et surtout virtuoses ? Ces musiciens Nantais sont en majorité des musiciens professionnels issus des formations les plus académiques et classiques. Enseignants et musiciens des orchestres classiques ou membre de quintette de cuivres, comme le tubiste Hervé Dubois. Trois questions se posent à Hervé Dubois : Comment est née cette formation Le Spectre d’Ottokar, sous quelles influences et avec qui les musiciens se familiarisent-ils avec cette musique ? C'est tout d'abord l'amitié qui nous lie depuis une dizaine d’années et qui a été le point de départ de cette rencontre avec les musiques des Balkans. Plusieurs d'entre nous connaissaient déjà les célèbres fanfares comme Ciocarlià, Kocani Orkestar ou Boban Markovic. Le côté festif et convivial de cette musique véloce et exigeante nous a tout de suite séduit et correspondait à l'esprit du groupe. Il a fallu d'abord s'atteler à faire des repiquages et réaliser des arrangements donc comprendre la construction rythmique, mélodique et harmonique de ces musiques. Au bout de quelques années d'existence, nous avons un répertoire d'une quarantaine de thèmes des Balkans et une vision plus précise des différents styles ou danses. La présence dans le groupe du trompettiste franco biélorusse Micha Passetchnik, de culture slave, nous a également apporté un autre éclairage sur ces musiques et la chance de travailler avec des musiciens du Kocani Orkestra a décuplé nos motivations et nos envies. Quelle est la composition type de ce style de fanfare et quel est l’apport d’un jeu instrumental classique (technique de l’ornementation, sons droits et tenus plus tôt que « bendés », sonorité ) ? En Serbie, ces fanfares sont composées essentiellement de cuivres mais l'emploi d'un saxophone est communément accepté en dehors des concours. Les cuivres sont presque toujours à palettes, facilitant un jeu véloce et très ornementé. Les « truba » (trompettes) sont en réalité des bugles à palettes joués avec une embouchure de trompette, les baritons correspondent à des tubas ténors à palettes et ont un rôle essentiellement rythmique, un peu comme les cordes d'un banjo. La basse est assurée par un hélicon à palettes et la percussion est composée d'une caisse claire et d'un tapan. Ce dernier est un instrument traditionnel des Balkans ressemblant à une grosse caisse dont une peau, très tendue et aigüe, est « fouettée » par une très fine baguette de bois lui donnant un son presque métallique; l'autre peau, grave, est frappée par une batte de bois. Il est vrai que notre expérience classique donne un son au groupe un peu éloigné de l'image que nous avons parfois de ces fanfares à la justesse très relative ! Mais tous les orchestres des Balkans ont beaucoup changé depuis 20 ans et leur technique a elle aussi évoluée. Leurs musiciens sont avides d'apprendre, d'écouter et de découvrir des musiques grâce aux nouvelles technologies. Les influences du jazz et de la salsa, ainsi que du funk sont désormais très présentes dans leurs arrangements. Comment est ressenti par les musiciens serbes et la population le prix obtenu par des français et d’autres étrangers. Sont –ils fiers que leur musique s’exporte ? Beaucoup de surprise mais pas l'ombre de jalousie. Nous avions le soutien de nos amis serbes de Guca qui nous avaient « intimer l'ordre » de gagner le premier prix après notre deuxième prix obtenu l'an dernier. Le fait d'avoir interprété « Oj Moravo », chanson traditionnelle imposée, à la mélodie simple et épurée de la région de Guca, a certainement joué en notre faveur. Plusieurs orchestres n'ont pas interprété la pièce imposée en invoquant le manque de temps, il est vrai que le délai de 5 semaines pour s'approprier, arranger et répéter un thème reste très court ! La recette fut de jouer, comme le font les tziganes, avec notre cœur pour toucher celui de l'auditeur. Le public serbe a été très sensible au fait d'entendre leurs thèmes traditionnels interprétés par des « francuz », et toujours étonné qu'aucun d'entre nous n'appartenait à leur culture. Nous avons aussi innové en reprenant sous une interprétation “balkanique” la chanson “Ni Oui Ni Non” de la chanteuse Zaz. Contact: Hervé Dubois 06.63.63.56.96 www.spectre-ottokar.com |
Y.R. |