Pour revenir à la newslettre, cliquez ici

Georges Jouvin nous a quittés Une époque s’en est allée

Avec le décès du trompettiste Georges Jouvin, ce 24 octobre à Saint Cloud, c’est toute la grande époque des variétés d’après-guerre et de celle des Yé-Yé, version instrumentale qui disparait. Georges Jouvin plus de 25 millions de disques vendus entre les années 1950 et 1990. L’homme à la trompette d’or, véritable dandy au sourire éclatant, toujours impeccablement habillé, a sillonné dans tous les sens du terme, géographiquement en déplacements sur les routes avec son orchestre de bal comme sur les microsillons 78 et 45 tours. Habitué des plateaux télés entourés des vedettes de la chanson et du cinéma de l’époque et des bals du samedi soir avec son orchestre. On peut apprécier ou non son style de trompette, mais comme on dit, il a mouillé la chemise en live sur de nombreuses estrades. Jouant dans une tessiture moyenne, sans forcer sur les aigus stridents et surtout avec un vibrato que d’aucun jugerons excessif sa sonorité large étaient ressentie par les générations pas encore habitués à la virtuosité de Maurice André comme du Bel Canto. D’ailleurs, le répertoire de Georges Jouvin, celui le plus célèbre, s’inspirait de reprises instrumentales de chansons populaires. Il inspira de nombreux jeunes à se lancer dans l’étude et la pratique de la trompette. Georges Jouvin voulait plaire, il a plu. Une anecdote racontée par l’un des témoins. Maurice André, plus jeune que Georges Jouvin et ne jouant pas sur les mêmes scènes, respectait son parcours. Un jour où Maurice André faisait tout de même la comparaison de leur talent, Georges Jouvin lui dit : Maurice, si j’avais ton talent, je n’aurais jamais gagné autant d’argent.  Georges Jouvin et Maurice André Pour autant, Georges Jouvin avait un désir secret, celui d’être reconnu comme un musicien complet. Lui qui a été formé au Conservatoire de Paris, dans la célèbre classe d’Eugène Foveau avec ses condisciples Roger Delmotte, Pierre Pollin, Marcel Caens, Gilbert Desprez, Fernand Vasseur et celui qui deviendra un grand chef d’orchestre Georges Prêtre. Aux dires de Roger Delmotte qui restera son grand ami, Georges Jouvin délaissait déjà la classe pour courir les cachets dès 1943. Il joue à la radio et fait ses premières séances de disques à 20 ans. C’est Richard Blareau qui l’oriente vers les variétés jazzy. Entre 1945 et 1954, il monte une section de trompettes regroupant Robert Fassin, Yves Lalouette et lui (soliste mélodique) à laquelle se joint dès 1948 Roger Guérin (soliste jazz). Cette équipe de requins qui, comme le voulait Georges, joue classique/variétés/jazz s’impose pour les disques et au Cinéma-Théâtre Gaumont où les plus grands dont Raymond Sabarich viennent les écouter. Georges Jouvin fut donc un excellent trompettiste de grand orchestre, capable d’assurer une partie de premier dans les orchestres de Jerry Mengo, Jo Bouillon, Hubert Rostaing, Aimé Barelli, Philippe Brun, Maurice Mouflard avec lequel en 1950 il accompagne Charlie Parker à la radio, Michel Legrand (1952, pour des disques). C’est à partir de 1952, qu’il débute une carrière de chef d’orchestre au Carroll’s. En 1954, il signe un contrat de vedette des disques VSM en 1954 et enregistre “Oh Mon Papa” qui fut un énorme succès. Pour son orchestre, il s’entoure des meilleurs musiciens de l’époque, le trompettiste leader Robert Fassin, le vibraphoniste Geo Daly, le saxophoniste Dominique Chanson… Avec la Télé naissante et grâce à des émissions comme Age tendre et Tête de bois, présentée par l’harmoniciste Albert Resnair à partir de 1961, Georges Jouvin conquière un large public. Il y rivalise avec Roger Guérin son ami. En 1970, Roger Guérin et Georges Jouvin se retrouve autour du projet des Trompettes de Paris avec Roger Delmotte. Il représente ainsi les trois styles de la trompette, le Jazz, les variétés et le classique. Ce projet tenait à cœur de Georges Jouvin qui voulait cette reconnaissance.   A la fin des années 1970 et début 1980, Georges Jouvin, enregistre pour le label Pathé-Marconi EMI à la trompette tous les hits du moment jusqu’à épuisement du filon, concurrencé par la vague Jean-Claude Borelly à partir de 1975 (enregistrements réalisés par le trompettiste Pierre Dutour). Avec 70 albums, 3 000 titres enregistrés et 25 millions de disques vendus, il est consacré en 1981 par un oscar de l'Académie du Disque. Georges Jouvin s’implique alors dans le soutien des artistes, comme Vice-administrateur de la SACEM, Vice-Président du GRISS (caisse de retraite des artistes du spectacle) en soutenant les intérêts d’une multitude d’artistes, jazz et variétés, dans la constitution de leur dossier de retraite. Il sera également président du syndicat des chefs d'orchestre de variétés. Photo © Franck Panikian/Maxppp S’il n’a pas eu la reconnaissance pleine et entière de ses pairs, tournés alors vers l’astre Maurice André, Georges Jouvin est fait chevalier de la Légion d'honneur le 13 juillet 1994 sur le contingent du Ministère de la culture et de la francophonie. Le communiqué du Président d’honneur de la SACEM, Claude Lemesle, daté du 25 octobre, salue « un saltimbanque gentleman ».   Un projet d’hommage à Georges Jouvin est en préfiguration. Nous en reparlerons. Document INA.fr 17 avril 1959, émission Discorama Merci à Michel Laplace pour ses archives.

Y.R.